• Pourquoi l’arrêté ministériel Covid est illégal

    Est-il légal d’imposer aux citoyens des obligations sanctionnées par des peines d’amende ou d’emprisonnement ? La réponse est en grande partie négative. En effet, s’agissant de la possibilité d’infliger des sanctions de ce type, l’article 22 de l’arrêté ministériel renvoie au seul article 187 de la loi de 2007.

    Une opinion de Nicolas Thirion, Professeur de droit à l’ULiège.

    En rejetant, ce 5 août, la demande introduite contre l’État belge et la Région wallonne en vue de les contraindre à ordonner des tests de dépistage à l’aéroport de Charleroi pour les passagers revenant d’une zone rouge, le juge des référés du tribunal de première instance francophone de Bruxelles en a profité pour administrer, en passant, une volée de bois vert aux autorités belges à propos des multiples atteintes portées à l’Etat de droit.

    Extrait : "l’insécurité juridique est complète, car les règles changent sans cesse ; les atteintes à la vie privée sont multiples et loin d’être toujours justifiées en droit ; les voyageurs de retour de l’étranger sont fichés même s’ils ne reviennent pas d’une zone à risque ; l’égalité devant la loi est un principe qui paraît ignoré : les magasins de produits non alimentaires ont dû fermer quand la grande distribution était autorisée à vendre ces mêmes produits, la foire du Midi est interdite quand les parcs d’attraction sont ouverts".

    Le juge a ainsi mis en lumière la piètre gestion juridique de la pandémie. Une des questions majeures en l’espèce est de savoir si le ministre de l’Intérieur a respecté le principe de légalité dans la prise des mesures destinées à lutter contre la propagation du virus (port du masque obligatoire, distanciation sociale, traçage dans l’Horeca, interdiction des rassemblements, etc.).

    Ce principe est une garantie fondamentale en démocratie, puisqu’il fait prévaloir la loi, votée par le Parlement composée de représentants élus par les citoyens, sur les mesures de l’exécutif qui lui seraient contraires. L’exécutif ne peut ainsi agir qu’en y ayant été habilité par une norme supérieure et dans le respect des limites de cette habilitation.

    A la lecture de l’arrêté ministériel en vigueur, on constate que le ministre s’appuie sur trois bases légales pour imposer ces obligations.

    D’abord, l’article 4 de la loi du 31 décembre 1963 sur la protection civile, qui lui confère le pouvoir de provoquer les mesures nécessaires à la protection civile pour l’ensemble du territoire national.

    Ensuite, les articles 11 et 42 de la loi sur la fonction de police du 5 août 1992, lui permettant, ainsi qu’aux gouverneurs de province, en cas de troubles à l’ordre public, de suppléer l’inaction des bourgmestres ou de prendre des mesures lorsque les troubles s’étendent sur le territoire de plusieurs communes.

    Enfin, les articles 181, 182 et 187 de la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile, qui autorisent, dans certaines circonstances, le ministre ou les bourgmestres à procéder à la réquisition de biens ou de personnes et à interdire la liberté de circulation de la population, sous peine, pour les citoyens qui n’obtempèreraient pas, de s’exposer à un emprisonnement de huit jours à trois mois ou à une amende de vingt-six à cinq cents euros.

    L'article 187 de la loi de 2007

    Est-il légal, alors, d’imposer aux citoyens des obligations sanctionnées par des peines d’amende ou d’emprisonnement ? La réponse est en grande partie négative.

    En effet, s’agissant de la possibilité d’infliger des sanctions de ce type, l’article 22 de l’arrêté ministériel renvoie au seul article 187 de la loi de 2007.

    Or cet article 187, rappelons-le, ne vise qu’à punir le refus d’obtempérer aux ordres de réquisition ou la méconnaissance de l’interdiction de tout déplacement ou mouvement de population. En aucun cas des mesures telles que le port obligatoire du masque ou le traçage n’y sont visées.

    On arguera que, si le ministre peut utiliser la bombe atomique (interdire tout déplacement), il aurait bien le droit de recourir à des armes plus légères mais ce serait oublier que le droit pénal est d’interprétation stricte dans une démocratie : il semblerait tout à fait contraire à un tel régime de prévoir des peines dans des cas que la loi, strictement interprétée, ne vise pas. Nulla poena sine lege. En clair : le ministre de l’Intérieur et les bourgmestres peuvent bien, sur la base de la loi de 2007, prévoir des sanctions pénales en ce qui concerne la réquisition de personnes ou de choses et l’interdiction de déplacement ou de mouvement de la population.

    En revanche, ils sont incompétents pour imposer sur cette base le port obligatoire du masque, le traçage, la distanciation sociale ou les rassemblements ou, plus exactement, ils sont incompétents pour accompagner ces mesures des sanctions pénales prévues par la loi de 2007.

    .

    Les conséquences

    Deux conséquences logiques à cela. D’une part, un arrêté ministériel ainsi dépourvu de base légale suffisante et les ordonnances complémentaires que les bourgmestres sont autorisés à prendre pourraient être annulés par le Conseil d’Etat, voire suspendus en extrême urgence si tant est que l’on considère que l’infliction d’une sanction pénale manifestement illégale est de nature à provoquer un dommage grave et difficilement réparable.

    D’autre part, les condamnations judiciaires qui auraient été prononcées sur la base de l’arrêté ministériel seraient, par ricochet, illégales et les contrevenants pourraient interjeter appel de ces condamnations.

    Par surcroît, les tribunaux de police, actuellement compétents pour les procès Covid, n’auraient d’autre choix que d’acquitter les prévenus poursuivis pour violation du port du masque, de la distanciation sociale, du traçage dans l'Horeca ou de l’interdiction des rassemblements.

    En tout état de cause, la Cour de cassation serait à terme amenée à connaître de l’argument tiré de l’illégalité de l’arrêté ministériel mais, d’ici là, beaucoup de verbalisations et de procédures illégales risquent de prospérer si l’on n’y prend garde.

    Devoir moral et obligation juridique

    En somme, à l’heure actuelle, tout citoyen agissant en tant qu’être libre et responsable a sans aucun doute le devoir moral de se comporter de façon prudente et respectueuse d’autrui mais, compte tenu de l’impéritie de l’Etat belge et du peu de cas qu’il aura fait du principe de légalité, il n’en a aucunement l’obligation juridique, puisqu’une obligation n’est telle que si elle est assortie d’une menace de sanction et que, en l’occurrence, cette menace (la sanction pénale) est manifestement invalide.

    Si un citoyen immoral se faisait verbaliser pour violation d’une des obligations autres qu’une interdiction de déplacement, il aurait dès lors intérêt (puisque nous le supposons immoral) à ne pas acquitter l’amende que les forces de police l’inviteront à payer et à se laisser poursuivre devant le tribunal de police, devant lequel il pourra plaider l’illégalité de la mesure qu’on veut lui infliger.

    Dès lors, de deux choses l’une : ou bien le gouvernement se borne à des recommandations non contraignantes en tablant sur la responsabilité des citoyens, ou bien il se décide enfin à respecter un tant soit peu l’État de droit, par exemple en faisant voter de toute urgence une loi conférant formellement au ministre de l’intérieur et aux bourgmestres le pouvoir d’imposer de telles mesures assorties de sanctions pénales.

    Toutefois, cette loi ne pourra agir rétroactivement et devra elle-même respecter les exigences de la Constitution et de certaines conventions internationales.

    A défaut, il sera doublement coupable : pour sa gestion erratique de la pandémie et pour sa désinvolture envers l’État de droit démocratique.

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